STYLE CRÉATRICE l’ appel de Londres Hermès s’est livré à une belle démonstration de chic masculin dans une ville où le style d’un homme reflète sa personnalité, son statut et un peu de son âme. Par Marie Pointurier “LONDRES EST UNE VILLE JOYEUSE. Si proche et pourtant si singulière. Ici, on comprend la cou- leur et la fantaisie. J’aime cet état d’esprit. Et son multiculturalisme reste pour moi très inspirant.” C’est le 21 mars dernier que Véronique Nicha- nian, directrice artistique de l’univers homme d’Hermès, a rejoué dans la capitale londonienne son défilé printemps-été 2019. Pour l’occasion, toute une scénographie éphémère, déjantée et poétique s’est déroulée autour de ce monde si particulier, dans un ancien tri postal. Londres qui vibre, toujours en tension, entre une tra- dition complexe et chérie et une excentricité tout aussi complexe et chérie; Londres qui fait les codes du chic comme elle les déjoue. Londres a donc été la destination choisie, comme un retour aux sources multiples pour celle qui renouvelle le vestiaire de l’homme Hermès depuis 1988. La maison sait manier la dérision et l’humour, comme en a témoigné l’intervention de l’illustrateur néerlandais Joost Swarte, sollicité pour l’occasion. Un joli clash. L’homme est davantage libéré des diktats que la femme. La mode masculine évolue vite depuis quelques années. Les grandes impulsions qui ébranlent la masculinité de papa et donc rejaillissent sur la manière dont les hommes se présentent au monde (le mouvement #MeToo, la fluidité des genres, le mas- culin/féminin…) ? Véronique Nichanian embrasse toutes ces évolutions avec la sérénité gaie de ceux qui ont une vision claire depuis le tout début. Et c’est finalement comme si l’époque rattrapait son état d’esprit. L’androgynie ? “J’ai toujours habillé des femmes aussi. J’ai des clientes fidèles qui, depuis vingt- cinq ans, achètent grands manteaux d’homme, gilets fins ou pulls oversized.” La fluidité des genres ? “Quand j’ai commencé, certaines matières et certaines couleurs étaient presque taboues pour les hommes. Dans une de mes pre- mières collections, j’ai pourtant réalisé un grand manteau en cachemire rouge.” Autant dire une décadence fabuleuse mais commercialement périlleuse au début des années 1990. Ce fut un succès. Le costume n’étant plus une obliga- tion sociale, le champ des possibles s’est ouvert. La notion de plaisir infuse le 128 / AIR FRANCE MADAME LATIGIDNI – REGZTEM REIVILO SOTOHP