Dès ses premières publications, il y a quelque chose qui m’a fasciné chez Matthieu. Une combinaison parfaite entre lisibilité, esthétisme et élégance naturelle du trait. On peut y ajouter une mise en scène toujours immersive et forte. S’il peut tout dessiner avec virtuosité, il l’a démontré, il n’y a pas la volonté chez lui de se mettre en avant avec des cadrages spectaculaires si ces derniers ne sont pas au service du récit. Il est de la trempe des grands auteurs qui savent doser leurs effets pour qu’à chaque instant, cela sonne juste. Encore une chose qui est toujours juste avec Matthieu, c’est la finesse de restitution des émotions qu’éprouvent ses personnages. Je suis souvent épaté par un regard, une attitude qui raconte tellement qu’il me vient une empathie directe et profonde pour le personnage. Ce n’est pas si courant. Je crois que toutes ces qualités étaient là dès le départ, il les a affinées au fil de ses albums. Elles représentent, à mon sens, l’Art de Matthieu Bonhomme. Un dernier point. À me relire, je me rends compte qu’on pourrait croire qu’il s’agit là d’un parcours en ligne droite vers l’excellence. Non, bien sûr que non. Toute cette habileté ne serait rien sans la rigueur nécessaire pour s’acharner des heures durant à sa table de dessin, réussir à dépasser ses doutes, chercher, buter face à ses limites avant de trouver, parfois, comment contourner le plafond de verre. Ce que vous voyez dans cette belle sélection où tout semble le fruit d’une aisance insolente est le résultat de tout ce labeur. La partie immergée d’une carrière dédiée à la narration et à la beauté. Ralph Meyer