N° 716 / DU 26 JANVIER AU 8 FEVRIER 2018 Cadre légal www.agefiactifs.com23 tribune PATRIMOINE L’apport de Johnny Hallyday à la gestion de patrimoine J ohnny Halliday, calement en France même si elle cela a été longue- n’y vit pas à partir du moment où ment évoqué, s’y trouve le centre de ses intérêts est économiques ; l’administration devenu en l’espace d’un demi-siècle une icône de la fiscale est en droit de prouver la culture populaire. A l’heure des situation fiscale d’un contribuable bilans, peut-être faut-il également par tout moyen. Aujourd’hui, envisager son apport à la gestion nous parlerions de domiciliation de patrimoine. fictive susceptible d’être réprimée sur le fondement de la fraude fis- Johnny face aux maisons cale. Mais dès 1975, comme le rap- de disque … Tout commence pelle Les Echos, le chanteur avait bien évidemment avec Jean-Phi- été condamné à de la prison avec lippe Smet. A 16 ans, le jeune JACQUES AMAR, maître de conférences en droit privé, Université Paris- sursis. Il n’a donc pas connu les Johnny signe un contrat sans Dauphine et associé fondateur de www.legal-tools.fr portes du pénitencier. l’autorisation de sa mère avec et AMÉLIE DE BRYAS, directrice adjointe, Institut de gestion la maison de production Vogue du patrimoine et de banque privée, Université Paris-Dauphine Et cela ne s’est pas arrangé . Johnny est mineur – n’aurait-il en vieillissa nt. Nous retrou- pas été lésé ? L’affaire ira en cassation et abou- vons Johnny en 2017 dans un montage à base tira à un arrêt de principe sur la rescision pour de holding située au Luxembourg et des fonds lésion : « Quelle que soit la nature du contrat, qui transitent via le Liberia avec un rappel la question de savoir si le mineur est ou non cinglant du juge : la volonté systématique lésé, est une question de fait soumise à l’appré- d’éluder l’impôt à partir de sociétés fictives ciation souveraine des juges du fond dont la constitue un abus de droit et non un procédé décision sur ce point échappe au contrôle de d’optimisation fiscale. la Cour de cassation » (Cass. 1 civ, 4 oct. 1966, vLe chanteur décédé e n°449). Et toute sa vie, Johnny aura défendu il y a peu de temps Même disparu, Johnny continuera à ses intérêts patrimoniaux contre les maisons de a tissé une histoire alimenter les finances publique s. Au- disques, contre la presse people. Il est même à singulière et fournie jourd’hui, Johnny est mort. Le requiem pour l’origine de la consécration du droit patrimonial dans le cadre de la quelqu’un que la fiscalité avait un peu rendu fou sur l’image (CA Versailles, 12 ch., 2e sect., 22 défense de ses intérêts a été joué. Mais, compte tenu de l’importance de e sept. 2005, SAS Calendriers Jean Lavigne c/ Sté patrimoniaux son patrimoine immobilier et des droits d’auteur Universal Music). que vont générer ses chansons, les probléma- vSon histoire tiques patrimoniales restent plus que jamais … et au fis c. Une chose est sûre : Johnny n’a patrimoniale ne présentes. Nous rappellerons donc que même pas uniquement cherché à défendre ses droits ; s’arrête pas là puisque si ses ayants-droit quittent réellement la France, il a surtout tout au long de sa carrière cherché à ses ayants-droit seront d’une part les droits d’auteur pour l’exploitation protéger son patrimoine du fisc de manière ni soumis à certains d’oeuvres à l’étranger, de même que ceux en toujours très élégante, ni toujours très efficace. impôts, y compris s’ils France perçus par une personne non domiciliée Johnny s’installe en Suisse en 2007 afin de bé- quittent la France sur le territoire, sont susceptibles d’être soumis néficier du fameux forfait suisse. Pas de chance, au prélèvement de l’article 182 B du Code général les photos postées sur Twitter ou Instagram des impôts ; d’autre part, les biens immobiliers révèlent qu’il passe très peu de temps dans son situés en France restent dans l’assiette du futur chalet, au mépris des règles du droit suisse. On impôt sur la fortune immobilière. Bref, même retiendra alors deux principes de base du droit mort, Johnny continuera à alimenter le budget de fiscal : une personne peut être domiciliée fis- l’Etat par-delà, finalement, ses dernières volont és. Rd