STYLE CRÉATRICE dans les pas de paula La directrice artistique de John Lobb signe les plus belles paires de boots féminines. Rencontre chez Paula Gerbase, à Londres. Par Lorène Duquesne –Photo Jo Metson Scott NÉE AU BRÉSIL, mère allemande, père italien, éduquée aux Etats-Unis, Suisse et Royaume- Uni, Paula Gerbase a le voyage dans le sang. “Je suis à l’aise partout : à la manufacture de John Lobb à Northampton, en Angleterre, où j’ai mon bureau, aux ateliers qui font du sur-mesure et au siège à Paris, dans une boutique japonaise… Chez moi, c’est en Suisse, où mes parents vivent. Et à Londres, où je suis basée depuis mes études à l’université Central Saint Martins.” En 2010, alors domiciliée à Soho, Paula quitte Savile Row pour lancer sa marque de prêt-à-porter, 1205, aux côtés de son boyfriend. “Notre appartement était devenu trop petit ; nous cherchions un endroit où établir notre studio au rez-de-chaussée, et notre habitation à l’étage. Cette maison était peinte en rouge, divisée partout par des rideaux filets… Nous avons tout démonté et repeint en blanc. Depuis, nous avons déplacé le studio à une dizaine de minutes à pied.” L’adresse, désormais privée, est à l’image de sa propriétaire : discrète, nichée dans un mews (une allée abritant jadis des étables, transformées en maisons de ville convoitées, ndlr) du quartier de Bloomsbury, laissant entrevoir un univers créatif minimaliste entre nature et artisanat, ponctué de plantes et d’objets soigneusement sélection- nés. “Ce qui m’intéresse, c’est la fabrication des choses”, précise Paula. les choses durables. Je souhaite que mon travail L’atmosphère s’accorde à merveille aux codes résiste aussi à l’épreuve du temps. L’un de mes Ci-dessus : Paula du bottier britannique John Lobb, dont la pre- ancêtres, révolté par le fait que ses sœurs n’aient Gerbase sur sa terrasse, mière enseigne vit le jour sur Regent Street – la pas accès aux mêmes études que lui,créa au à Bloomsbury. “Mon même rue traversée deux ans durant par Paula xviiesiècle un fonds pour permettre aux femmes uniforme ? Un Levi’s 501 homme, un T-shirt pour se rendre à Savile Row – en 1866. Nom- de sa lignée d’aller à l’université. Ma mère en a et un sweat Sunspel, mée directrice artistique de la maison en 2014, la bénéficié. Ce souci de l’après-soi m’inspire beau- uncaban en molleton.” jeune femme commence par tout apprendre sur coup.” Les points communs entre Paula et John Page de droite : détails (Lobb) ne s’arrêtent pas là. de sa maison et de son les souliers, avant de débuter leur conception. “Historiquement, studio. “Je suis du genre “Chez John Lobb, les archives sont si riches qu’il les bottines de marche sont très présentes chez à me passionner pourun domaine jusqu’à s’agit surtout de faire des choix et de les éditer. J’ai la marque. J’ai commencé à tester mes versions l’obsession. Ça a été le lancé la ligne femme après avoir découvert une dans les Cornouailles, où est né M. Lobb, et à cas avec les agavacées : boîte pleine de formes en bois, développées en découvrir ce sublime littoral… Je suis devenue j’ai commencé à acheter 1999 à cet effet mais jamais commercialisées.” Les très active ; mes boots ne me quittent plus, même des bouquins, à faire desrecherches, et enfin à maîtres mots de la griffe ? “Modernité et qualité . à Londres.” Et l’accompagnent, à bonne allure, en acheter de multiples Les artisans sont incroyables. C’est ce qui rend jusqu’à la prochaine aventure… exemplaires.” 130 / AIR FRANCE MADAME