PROGRESSER Les écoles et les universités disposent de programmes de Figure 1 – Segmentation de l’approche entrepreneuriale formation à l’entrepreneuriat, utiles à des fins pédago- giques, mais peu adaptés en situation d’incertitude, notam- ment lorsque les encadrants et les formateurs présentent des biais culturels : salariés de grandes entreprises tentant d’adapter des modèles de développement industriel dis- proportionnés, enseignants du secteur public ayant une approche théorique de la création d’entreprises. Bien que connus, les déterminants de la création d’entreprises chez les étudiants sont peu pris en compte. En effet, la plupart des systèmes pédagogiques visent au développement, comme dans d’autres matières, des capacités entrepreneu- riales et des techniques supposées associées (plan d’af- faires...) et négligeant un des critères déterminants : l’attrait. En cela, l’acquisition de ces compétences sur une base théorique peut même, pour peu qu’elle soit rébarbative, conduire, par la réduction de l’attrait, à une contre-perfor- mance regrettable, d’autant que les modes de création d’entreprises en France se sont depuis quelques années, Par certains aspects, cette segmentation ressemble à la notamment par l’informatisation des services, extrêmement typologie de Jung. La méthodologie que nous allons rete- simplifiés. En véhiculant une fausse image de difficulté, ces nir a donc fortement à faire avec un comblement des approches peuvent limiter les projets effectivement menés sous-évaluations de chacun des types et une relativisation à bien, ce qui est effectivement observé. Les formations de leurs tendances naturelles. Toutefois, l’accompagnement ont un effet modéré sur l’intention entrepreneuriale, les d’un entrepreneur ne peut se faire, et en cela elle diffère caractéristiques liées aux personnalités et aux valeurs sont fortement de l’accompagnement pédagogique, que par : déterminantes : autonomie, pouvoir, action, désir d’avoir un travail intéressant. • une personnalisation très importante ; • l’apport d’informations claires, stables et documentées ; Il est à noter que ces recherches mettent en avant trois • l’interdit de décider à la place : seul l’entrepreneur est perceptions ou croyances, qui priment substantiellement légitime pour prendre les décisions. sur la réalité effective. Dans ce contexte, la mission que nous nous sommes fixée a été de traiter ces croyances par leur Un point particulièrement important, propre à la popula- concrétisation avec des éléments factuels, de manière à tion de créateurs considérés, est constitué par l’ensemble passer d’une forme de pensée magique à une sécurisation des désirs des entités environnant le jeune entrepreneur. rationnelle et objective. Ces trois croyances sont : De jeunes et photogéniques entrepreneurs suscitent • la perception de désirabilité ; l’appétence des structures engagées dans leur projet : • la propension à agir ; • la perception de faisabilité. • leurs écoles, qui veulent montrer la pertinence de leur formation ; Dans ce contexte, nous pouvons observer quatre types de • leur banque, qui veut montrer qu’elle soutient l’inno- créateurs étudiants (figure 1), même si cette segmentation vation ; peut être relativement floue pour la plupart d’entre eux et • les collectivités locales, qui veulent prouver l’attracti- peut varier en fonction de l’évolution du projet. vité de leur territoire ; 66 • MARS-AVRIL 2019 •