intervieW Laurence Equilbey, chef d’orchestre au féminin laurence equilbey a dirigé les orchestres de lyon, bucarest, liège ou leipzig, ainsi que de nombreux opéras. chargée de la programmation classique de la future cité musicale de l’île seguin, à paris, qui ouvrira ses portes au printemps 2017, elle nous raconte les défis qui l’attendent. par a nne-l aUre l eMancel en prévision de l’ouverture de la cité musicale, sur l’île seguin, complexe, doté de boutiques de musique, d’un grand au printemps 2017, vous avez, en partenariat avec le départe- écran extérieur, sera doté par ailleurs d’une salle ment des hauts-de-seine, fondé l’insula orchestra, qui y sera en « pop » de 4 000 à 6 000 places : la confrontation résidence permanente. racontez-nous sa gestation… des styles favorisera les passerelles, mixera les En 2017, l’orchestre fêtera ses cinq ans : le temps publics. Enfin, le caractère insulaire conférera un d’acquérir sa patine, sa réputation, en France et esprit festivalier. Une approche complémentaire à l’international, mais aussi sur le territoire des de celle de la Philharmonie ! Hauts-de-Seine, à travers un programme d’actions pédagogiques innovantes. Son nom tient, bien sûr, en plus de votre rôle de chef d’orchestre, vous assurerez une à sa destination, l’Île Seguin. Mais il se réfère aus- partie de la programmation classique. un défi ? si à l’insula, cette région du cerveau découverte Je suis ravie ! Cette fonction me permettra de récemment, douée de la fonction primordiale de développer mes idées, de recevoir des artistes transformer les sensations en émotions. De l’odeur que j’aime, d’accentuer la présence des arts plas- d’une rose qui chatouille nos tiques, et surtout de défendre narines aux plaisirs qu’elle nous mes principes, tel celui d’une procure : voici son rôle. « La musique n’est meilleure répartition artistique hommes-femmes. Je dispose l’insula orchestra joue uniquement sur pas encore aussi d’une liberté totale pour des instruments d’époque. pourquoi ? le formidable terrain proposer des formats inédits : Du baroque jusqu’en 1850, je concerts « flash », sets de clas- préfère largement les sonorités de liberté qu’elle sique à l’image de ceux du jazz, d’époque, que je juge plus mo- etc. Et puis, une à deux fois par dernes, plus dynamiques, mieux pourrait devenir » an, je proposerai des « concerts adaptées au répertoire : ainsi, la scéniques », la future spéciali- balance – l’équilibre entre les té du lieu. Le premier sera La pupitres – s’y respecte mieux ; et les phrasés se Création de Haydn, mis en scène par la compa- révèlent incomparables, telles les mélodies, quasi gnie catalane La Fura dels Baus. Avec l’orchestre « calligraphiées », des cordes ! en fosse, les chanteurs, sur scène, joueront des rôles, évolueront dans l’espace, disposeront d’une après l’ouverture de la philharmonie en janvier 2015, celle de la tablette pour gouverner un globe. Ce sera tech- cité musicale, sur l’île seguin, correspond-elle à un réel besoin ? nologique et hyper visuel. Premièrement, je crois en la proximité géographique. De même que la Philharmonie reçoit un public vous êtes très attachée à l’ouverture au « grand public ». de l’Est parisien, la Cité Musicale, située à l’oppo- En effet, je n’aime pas les spectacles réservés à sé, s’adressera forcément à d’autres populations. « ceux qui savent ». Nous travaillons énormément, Ensuite, la salle classique disposera d’une fosse, donc nous souhaitons partager au maximum cette pour proposer des « concerts scéniques ». Ce grand beauté que nous tâchons de construire. 64 - France WorldWide