( TÉMOIGNAGES) DERRIÈRE LA PORTE lesliedjhone « J’y ai perdu la finale des Jeux » z « J’ai déjà perdu un grand championnat dans la chambre d’appel. C’était à Athènes, en 2004, mes premiers Jeux olympiques… J’étais le seul Européen en finale, avec des gars des Caraïbes, des Etats-Unis. La saison précédente, aux Mondiaux de Paris en 2003, j’avais débarqué un peu de nulle part (Ilavait terminé 4, à un souffle du podium, NDLR).e À Paris, j’étais protégé. C’était à la maison, devant le public français, avec Marc (Raquil) dans la course, en garde rapprochée. Là, à Athènes, j’ai été ramené à la réalité. Je suis arrivé avec la troisième ou quatrième perf’ mondiale, mais les gars ne me connaissaient pas vraiment. Je devais avoir 23 ans, et ils ne m’ont pas calculé : d’un coup, ils se sont réunis au centre de la pièce pour prier tous ensemble. Et moi, je suis resté seul, dans mon coin. Je ne sais pas du tout si c’était préparé, mais ça m’a fait bizarre, ces mecs qui ne te disent même pas bonjour… Pour eux, je pense que j’étais un peu l’erreur de casting. J’ai pris un gros stress d’un coup. Et quand je suis arrivé sur la piste, j’étais tout tremblant, j’avais perdu tous mes moyens. Cette histoire m’a marqué. J’arrivais en forme, et cet épisode a changé beaucoup de choses. Mais finalement, c’est le jeu. J’ai beaucoup appris, ce jour-là. Je me suis dit : “OK, c’est comme ça que ça se passe ? Maintenant je sais…” Quand on court son premier grand championnat, on n’est pas préparé à ça. À partir de là, je ne me suis plus laissé avoir. Je restais concentré sur ce que je savais faire, focalisé sur ma course, et je ne prêtais plus attention aux autres. » estelleperrossier « Une chance et un plaisir » z « Mes premiers championnats en seniors étaient les Relais mon- diaux en 2014. J’ai commencé l’athlé tard, donc je n’avais pas eu l’occasion de me faire la main dans les sélections jeunes. Je me retrouvais titulaire en équipe de France pour la première fois de ma carrière, et j’étais stressée. Je l’avais dit à Muriel (Hurtis) pendant l’échauffement collectif avant d’entrer en chambre d’appel, et elle m’avait rassurée en me disant que si j’étais là, c’était que je le méritais, et que je devais en profiter. Après ça, j’ai compris qu’en chambre d’appel, tout le monde est dans le même sac, même si on vise une médaille individuelle, qu’on s’appelle Allyson Felix ou Sanya Richards… Finalement, ça a toujours eu un effet boostant sur moi. Je vis ça comme une chance, un plaisir d’être dans une chambre d’appel avant un championnat, avec des filles que je voyais à la télé il n’y a pas si longtemps. Comme un honneur, et surtout pas une obligation. Mon coach, d’ailleurs, me le répète toujours : ‘‘Tu as ta place ici.’’ » 72 ATHLÉTISME MAGAZINE AVRIL-MAI 2019