UN NOUVEAU SCÉNARIO En 2016 à Amsterdam et en 2018 à Berlin, ses médailles d’argent en plein air, décrochées à chaque fois derrière l’Ukrainienne Nataliya Pryshchepa, avaient laissé à Rénelle Lamote un goût d’inachevé. « Aux Pays-Bas, elle est plus forte que toutes les autres mais elle est encore jeune et ne gère pas bien les tours, retrace son entraîneur Thierry Choffin. Elle en laisse trop en séries et endemi-finales. Et en Allemagne, ellese fait balader en finale en faisant beaucoup l’extérieur et ne peut pas mettre en place le schéma prévu. » Scénario complètement différent à Glasgow, même si la demi-fondeuse de Pays de Fontainebleau Athlétisme navigue beaucoup, une nouvelle fois, au couloir 2. Arrivée sans repères et loin aux bilans continentaux (2’02’’00), après une première partie de saison hivernale gâchée par une intoxication alimentaire, elle tombe tout simplement sur plus forte qu’elle avec la Bri- tannique Shelayna Oskan-Clarke, vainqueure en 2’02’’58’’, quarante-deux centièmes devant elle. « J’ai eu la sensation de maîtriser beaucoup plus ce que je faisais, apprécie Rénelle. Je ne pense pas avoir subi du tout la finale. Je me suis sentie actrice. » « On a sauvé le truc. Sans être au top, elle a eu le mental malgré le manque de certitudes », confie, soulagé, son coach. « Avant, je me fatiguais beaucoup au niveau émotionnel à chaque tour. J’ai appris à me concentrer sur l’instant présent, à ne pas être trop impatiente. » UNE NOUVELLE APPROCHE Pour passer un cap sur le plan mental, Rénelle Lamote a commencé à échanger fin 2016 avec une psychologue du sport, Meriem Salmi. Un travail de longue haleine, qui porte progressivement ses fruits. Encore totalement paralysée par le stress en finale à Berlin l’été dernier d’après sa psy, l’athlète de 25 ans se sent désormais « plus disponible » le jour J. « Avant, je me fatiguais beaucoup au niveau émotionnel à chaque tour, explique-t-elle. J’ai appris à me concentrer sur l’instant présent, à ne pas être trop impatiente. » Un état d’esprit qu’elle tente d’appliquer également au quotidien, elle qui pouvait rapidement être au fond du trou au moindre entraînement raté. « Je prenais chaque séance test comme une compétition, dévoile-t-elle. Je pensais tellement aux résultats que je finissais par me sentir débordée. J’ai appris à voir l’athlé différemment. J’ai compris qu’enlever une séance ne va pas bouleverser ma saison. J’essaye de prendre du recul. Je me sens beaucoup plus sereine. Je sais que j’ai le temps. » UN NOUVEAU MODE DE FONCTIONNEMENT « On ne manage pas de lamême manièreune jeune femme quand elle a 21 ans et quand elle en a25. » Le constat de Thierry Choffin s’applique à Rénelle Lamote, qui a beaucoup gagné en autonomie depuis son arrivée au pôle de Fontainebleau lorsqu’elle était junior première année. « J’étais beaucoup moins mûre à l’époque, reconnaît la principale intéressée. J’étais comme une enfant qui écoutait les consignes et qui ne voulait surtout pas sortir du cadre. Maintenant, on est plus dans une collaboration d’égal à ég »al. De quoi instaurer un climat de confiance qui pousse la demi-fondeuse à plus s’exprimer, elle qui avait longtemps passé sous silence sa douleur au tendon d’Achille avant les Jeux de Rio en 2016 : « Avant, j’avais tendance à tout garder pour moi. Je ne disais jamais que c’était dur, j’attendais d’atteindre le point de non-retour. J’ai appris à écouter mon corps. Je partage plus mon ressenti avec Thierry.Du coup, l’entraînement, est encore mieux adapté.» « On espace plus les séances, confirme l’entraîneur. Le but est que Rénelle soitplus sur des sensations, des tempos. » Une stratégie payante, puisqu’il« la trouve plus forte, plus rapideet plus endurante qu’avant. Je sais qu’elle va faire mieux qu’elle ne l’a jamais fait », promet Thierry Choffin en conclusion. WWW.ATHLE.FR 21