La crainte d’autres attaques ou de tensions entre les LA PAROLE VÉRONIQUE RICHES-FLORES, deux puissances rivales dans la région, Arabie saou- À... économiste chez RF Research dite et Iran, mais aussi le risque d’une remise en route plus lente qu’annoncée des capacités de production « Une prime de risque durablement élevée saoudienne perturberaient de nouveau le marché. Or, deviendrait rapidement récessive » en-dehors de ces réserves, les capacités de production supplémentaires sont limitées. « Les plus faciles à mobi- liser seraient celles d’Arabie saoudite car elle a été la La prime de risque sur le prix du chute des cours de 2014. Plus le cycle principale contributrice dans l’accordde réuctiond pétrole va-t-elle rester élevée ? est avancé ou la conjoncture fragile, de production de l’Opep », note Christine Besset. Les Vu le niveau important des stocks de plus la variation des prix du pétrole autres pays ont des moyens limités. Les pétrole dans le monde, largement aura un impact. Vu le fragile équilibre trois plus importants Koweit, Emirats suffisants pour faire face à la rupture de la conjoncture mondiale actuelle, Arabes Unis et Russie peuvent à peine d’approvisionnement en Arabie une prime de risque durablement en mobiliser 750.000 b/j. Une grande saoudite, il n’y a pas de élevée deviendrait rapidement partie de la production a été retirée du raison que cette prime soit récessive. marché ces dernières années en raison des forte. Le véritable risque difficultés du Venezuela ou des sanctions imposées à l’Iran (2 millions de barils). est celui d’une escalade Quel est le risque ? Les Etats-Unis, désormais premier pro- des tensions dans la La facture pétrolière mondiale ducteur mondial avec 12,5 millions de région. Cette prime de est d’environ 3 % du PIB b/j, ont une marge réduite. « La produc- risque politique, justifiée, n’a avec des cours moyens de 60 tionva croître mais moins vite que par quant à elle aucune raison de baisser dollars. Une hausse durable de 10 le passé », note Christine Besset pour à court terme et peut augmenter en dollars des cours équivaut à un qui les producteurs de pétrole de schiste, cas de nouvel événement susceptible manque à gagner de 0,5 % du PIB des acteurs privés très morcelés, n’ont d’envenimer la situation dans la mondial. Pour l’heure, la hausse pas de capacité à accroître rapidement région. de 5 dollars, soit 10 %, va avoir leur production. Pour cela, il faut que les un impact de 2/10 sur l’inflation ; prix restent élevés de façon durable pour Une hausse des prix du baril de avec des conséquences sur un qu’ils investissent. « Sous la pression de pétrole peut-elle provoquer une pouvoir d’achat des ménages déjà leurs actionnaires, beaucoup de sociétés récession ? bas. Les marges des entreprises ont diminué leurs investissements pour A eux seuls, les prix du baril ne sont seront aussi affectées, et donc leurs se concentrer sur les gisements les plus pas à l’origine des crises, à l’exceptioninvestissements. Cette inflation rentables », ajoute l’analyste. des années 1970. En revanche, ils supplémentaire s’ajoute à celle DEMANDE EN BAISSE peuvent devenir un accélérateur. En provoquée par la hausse de tarifs Le marché ne peut plus être complai- 2008, par exemple, la flambée des prix douaniers aux Etats-Unis, ce qui gêne sant face à ce risque. « Ces attaques a exacerbé les tensions inflationnistes la Fed dans sa volonté de baisser les représentent une escalade à niveau de la fin du cycle conjoncturel et a taux. Paradoxalement, l’envolée des un malencontreusement incité la BCE à cours du brut lundi 16 septembre de tensions inédit dans la région », s’in- relever ses taux directeurs en juillet... quiète Harry Tchilinguirian, économiste matières a plutôt provoqué une baisse des premières chez BNP Paribas. Ce n’est pas la pre- Mais la baisse des prix peut aussi taux à terme qu’une hausse des mière attaque perpétrée par les rebelles yéménites. provoquer un choc économique si la anticipations d’inflation, signe que Mais jusque-là, le marché n’avait pas appliqué de conjoncture est mal orientée, avec un la crainte du marché est celle d’une prime à cette situation. « L’Arabie saoudite n’est plus risque de déflation comme après la récession. seulement vulnérable par rapport autransort dup brut via le détroit d’Ormuz », relèvent les analystes de Moody’s. La facilité avec laquelle ces attaques ont atteint leur cible et les dégâts occasionnés inter- rogent sur le niveau de sécurité des installations saou- « Si l’Arabie saoudite montre qu’elle peut parer les diennes. « La vulnérabilité de la chaîne d’approvi- attaques de drones, la prime de risque baissera, sinon sionnement saoudienne et la probabilité de nouvelles elle augmentera », affirme Harry Tchilinguirian, qui attaques oblige le marché à intgrer ce risque dansé se montre pessimiste sur les prix du pétrole en raison le prix », affirme Harry Tchilinguirian. Une prime du ralentissement mondial affectant la Chine et les de risque que les modèles de TAC Economics esti- Etats-Unis, et la forte hausse à venir des exportations ment entre 2 dollars à court terme et 5 dollars à de brut américain. moyen terme, reflétant ce nouveau climat d’incerti- Dans l’équation du pétrole, il y a deux inconnues : tude. Pour l’économiste de BNP Paribas, cette prime l’offre et la demande. « L’Opep vient de revoir à la politique, aujourd’hui de 5 dollars, va varier dans le baisse pour le deuxièmemois consécutif sa prévision temps en fonction des incertitudes pesant sur l’offre : de croissance de la demande », rappelle Unicredit. A DU 26 SEPTEMBRE AU 2 OCTOBRE 2019L’AGEFI HEBDO/ 17 RD