AMEDEO Du Figaro au Vendée Globe TEXTE : ANNE DE SAINT PÉRIER Il ne vient pas du “circuit”, il n’est pas du milieu. Amateur de mettre à sa disposition un nouveau bateau de régate, le X332. passionné, il commence par régater à tour de bras, mais en « Je te le prête, toi tu trouves un sponsor pour payer les voiles de course dilettante. Son vrai métier, c’est journaliste. Brillant écono- et tu montes un équipage avec tes potes. » Fabrice s’exécute et court miste du Figaro, avec à son arc des diplômes de Sciences ainsi en tribu toutes les compétitions du Trophée Atlantique. « C’est Po et d’HEC, il est au contact des gens, au cœur d’une comme ça que j’ai commencé à voler un petit peu de mes propres rédaction qui fourmille de monde, dans un quotidien diablement pragmatique, fait de chiffres, de graphiques Fabrice Amedeo et d’analyses. Du métro-boulot-dodo, il décide un jour, et son père Jacques. Fabrice Amedeo and après une route du Rhum chaotique qui ne lui offre que his father Jacques 20 minutes d’un délicieux répit à l’arrivée, de passer au bateau-boulot-dodo. Du bouillon de la rédaction d’un des plus grands quotidiens de France, il passe à la solitude du large. Récit d’un virement de bord manœuvré avec brio par Fabrice Amedeo. I l parle aussi vite qu’il navigue sur Newrest – Art & Fenêtres, un IMOCA à foils, sa “machine de guerre”. Il n’a pas de temps à perdre. Bientôt le Rhum, son troisième. Il faut s’entraîner avec son coach, communiquer auprès des partenaires et du public, naviguer et instagramer en même temps, préparer l’homme et le bateau, prendre part aux courses, et surtout, ne rien casser, ni l’homme, ni le bateau. ailes et à monter mes premiers projets voile ». Quant au large, c’est Il raconte son parcours, c’est une mécanique bien rodée. On essaiegrâce à des convoyages transatlantiques qu’il s’y est essayé. À 20 de suivre, et comme le récit est aussi structuré que le marin, on ne s’yans il fait son premier saut dans le grand bain et replonge plusieurs perd pas. C’est sur le lac de Pareloup dans l’Aveyron, que son pèreannées de suite. «Mais le vrai gros déclic, il est venu plus tard, je vous Jacques lui transmet le virus de la voile, inoculé par un dériveur sur raconterai ». Parce qu’il a fallu encore bien d’autres expériences pour lequel Fabrice navigue dès l’âge de trois ans. Du dériveur, Jacquesdécider Fabrice à quitter le pavé parisien. Quand il a 30 ans, Jacques passe au First 22, qui deviendra la maison de vacances avec vue sur(encore lui !), lui dit qu’il doit naviguer sur d’autres bateaux. mer de la famille. « Tous les étés on partait un mois en croisière, et on faisait aussi les week-ends d’avant-saison et les week-ends d’ar- MIEUX VAUT ÊTRE SEUL rière-saison. On allait soit à Pénerf, dans l’estuaire de laVilaine, soit auOn est alors en 2008 et Fabrice jette son dévolu sur un Figaro pour Crouesty, dans la baie de Quiberon, ou encore à Pornichet ». faire la Transat AG2R en double entre Concarneau et Saint-Barth. « Une expérience qui humainement s’est tellement mal passée, que je JACQUES A DIT me suis dit que j’étais prêt pour le solitaire. » Il va donc faire la Solitaire En 1986, Jacques décide de renouer avec ses anciennes amours du Figaro, avec 3 jours de nav’ en solo comme unique préparation. (il régatait étant jeune avec son père, le grand-père de Fabrice) etIl ferme la marche de deux épreuves sur trois, « prend des bâches » achète un bateau taillé pour la course-croisière, le Dehler 36. Fabricedans le petit temps mais s’en tire en valsant les doigts dans le nez est adolescent et participe au Spi Ouest France avec le pater fami-dans le gros temps. « Je me dis, t’es pas un bon régatier mais t’es un lias, puis plus grand, ils courent ensemble toutes les Fastnet qu’ilsbon marin, il faut que tu continues. Et du coup je me lance dans la voient passer, sept d’affilée. « Pour moi la passionde la voile, c’estRoute du Rhum 2010 en class40. Là je suis encore journaliste au Figaro aussi une belle histoire de transmission père-fils. En plus on afait desà plein temps bien sûr. » Bien sûr ! On estun peu soufflé par ce côté supers résultats, c’étaient de belles années. » C’est encore Jacques« je peux toutfaire », mais les marins d’aujourd’hui nous y habituent qui propose à Fabrice à ses 25 ans et alors jeune journaliste au Figaro,de plus en plus et Fabrice nous dira plus tard que la course au large 27