MANUSCRIT autographe (brouillons) pour Les Misérables, au dos d’une L.A.S. « Charles » de Charles HUGO (1826-1871) à son père, [Bruxelles] Vendredi 7 juin [1861] ; 1 feuillet recto-verso. 4 notes en brouillon pour Les Misérables. [Hugo est alors en Belgique, avec Juliette Drouet, près de Waterloo, où il travaille à son roman.] Charles écrit à son père : « Mon bon petit père, j’irai te voir Dimanche matin. Nous partons à neuf heures, Émile et moi. Je mets aux pieds de Madame Drouet mes respects. Je t’embrasse, je t’aime et je n’ai pas besoin d’ajouter que je te vénère profondément. Charles ». Au dos, Victor Hugo a jeté au crayon le brouillon de quatre idées pour Les Misérables, chacune biffée d’un trait de plume à l’encre après utilisation dans le manuscrit ; ces idées de premier jet, difficiles à déchiffrer, sont très différentes du texte définitif. « les petits princes souverains d’Allemagne qui fournissent la moitié d’un fantassin à la Confédération germanique et qui occupent leurs loisirs à faire sécher leurs chaussettes sur leur haie. » (IV, 12, II) Une réplique de Toussaint (pour IV, 5, III ?) « Écoutez-moi, je vais vous dire. J’ai vécu toute ma vie pour elle. Nous avons demeuré d’abord dans cette masure, en revenant de Montfermeil, et après dans le couvent, ensuite près du Luxembourg. Nous avons été ensuite rue Plumet où il y avait un jardinet. Nous ne nous quittions pas. Je ne sais pas si vous me comprenez, monsieur Pontmercy, mais s’en aller à présent, ne plus la voir, ce serait difficile. » (V, 7, I) « Ils se regardent tous les deux – Je t’adore ! Et tombent dans les bras l’un de l’autre. Puis Cosette se redresse : Je vais rester. – Non, dit Marius. – Encore non ? – Impossible. » (idem).Puis cette phrase non biffée : « Il eut le frémissement de ce quis’écroule ». 2 000/2 500 € Copie autographe d’une lettre de Victor HUGO, Guernesey, Hauteville House 2 octobre 1861, à M WOLTERS à Amsterdam ; 2 pages in-4. Sur le « banc d’Amsterdam », banc «rococo » acheté par Victor Hugo le 7 août 1861 à Wolters, propriétaire de l’hôtel Rondeel à Amsterdam. Il sera livré le 16 décembre à Guernesey, puis peint et doré par l’artisan doreur Grigg, et installé dans le salon bleu de Hauteville house le 30 mai 1863 (Hugo y peindra des fleurs et un blason sur le dossier le 24 mars 1864), où il est tou- jours en place. Hugo a reçu une lettre des courtiers maritimes de Rotterdam Hudig et Pieters, l’informant que Wolters refuse de livrer le banc, et il proteste : « le prix proposé par moi a été sur le champ, et avec empressement, accepté par vous. Dans tous les pays où la probité commerciale est comptée pour quelque chose, et, je le pense, en Hollande aussi bien qu’ailleurs, il est de règle stricte que l’objet vendu, et dont le vendeur a touché le prix, n’appartient plus au vendeur. L’objet payé par moi à vous, monsieur, est donc à moi et n’est pas à vous. Vous n’avez aucun droit sur cet objet. Ne pas le livrer équivaudrait à le voler. [… ] La petite aventure du banc acheté par moi à l’hôtel Rondel d’Amsterdam tient une place dans le livre que je vais publier pro- chainement sur mon voyage en Hollande », et il regretterait d’être forcé de terminer son récit par la constatation de l’indéli- catesse de Wolters, ce qui serait « fâcheux pour vous et pour votre maison ». Il demande la livraison immédiate de ce banc qui lui appartient… 250/300 € fille du poète, devint folle. Copie autographe d’une lettre de Victor HUGO, Hauteville house 9 mai 1862, à Alfred CUVILLIER-FLEURY ; 2 pages in-8. Sur Les Misérables(dont Cuvillier-Fleury avait rendu compte dans le Journal des Débatsdu 29 avril). Hugo le remercie de son « article si remarquable […] par le talent et l’élévation loyale de la critique littéraire », qui serait excellent « sous un régime de liberté », où « la discussion politique, sociale et philosophique » pourrait donner lieu à une réplique, alors que « sous le ré- gime actuel » le débat peut être brutalement arrêté « par la censure et la police […] Vous avez une de ces plumes qui guérissent aisément les blessures qu’elles font. Peut-être dans la suite de votre appréciation, jugerez-vous juste de couvrir un peu, ne fût-ce qu’au point de vue littéraire, ce livre qui est de bonne foi ; et vous vous honorerez en prouvant au pouvoir peu moral et peu scrupuleux de ce régime, que les écrivains ne lui livrent pas les écrivains »… 300/400 € officier,il s’illustra en Algérie ;homme politique républicain, opposant à l’Empire, il mourut en exil. L.A., Bâle 30 mai 1862, [au colonel Aimé LAUSSEDAT] ; 4 pages in-8. Belle lettre d’exil, sur Victor Hugo et Les Misérables. Il le remerciede ses paroles dans leur terrible épreuve. Il parle longue- ment de la douloureuse maladie de leur ami Kestner, qui a séjourné un mois chez lui ; elle n’a changé en rien sa fermeté de ca- ractère, sa bonté, sa simplicité et son patriotisme… « Que dis-tu de HUGO continuant la légende Césarienne, Napoléonienne, réhabilitant le prêtre, le moine, le mouchard, et arrangeant l’histoire en conséquence ? Il y a un tollé général parmi nos amis, à Paris et ailleurs […] Dix ou quinze fois je me suis mis à la lecture de cette demi-douzaine de volumes et, tout autant de fois, le livre m’est tombé des mains. Pour moi ce ne sont pas Les Misérables, mais Les Déplorables». Il convient qu’il y a quelques belles pages, « mais combien de mauvaises ! Quant à la donnée même, […] Hugo, à force d’exagérations, de non-sens et de contresens et de contrevérités, l’a faite fausse. C’est triste, fort triste. Le livre se vend mal, me dit-on à Paris, très bien en province – en Suisse, pas du tout »… Il termine par la politique : « L’opinion des politiques à Paris est que l’empire se dégrade à vue d’œil. Je le crois, mais il y a des machines détraquées qui vont longtemps »… 300/400 €