66 Société Dans l’ombre de ces grands noms de l’architecture, d’autres intérieure hélicoïdale. « C’est une vraie utopie architecturale. se sont montrés tout aussi novateurs. À Saint-Étienne, Émilie, Ici, on se croise, on se parle. Levivre-ensembleest inscrit dans architecte paysagiste et guide touristique pour la ville, habite la structure même du bâtiment. » Ces gardiens du patrimoine dans un immeuble signé Auguste Bossu, construit en 1933. ne cherchent pas seulement à préserver le bâti. Ils perpétuent Une maison sans escalier, structurée autour d’une rampe également le mode de vie d'antan, plus humain, plus collectif, plus durable par l'entretien régulier, le réemploi de matériaux et le recours à des savoir-faire locaux. Tous ont en tête une Ici, pas d’escaliers : vision à long terme. Ils ne se contentent pas d’habiter : ils poursuivent l’Histoire. n une rampe en spirale nous relie les uns aux autres » Amélie vit dans la maison d’Auguste Bossu à Saint-Étienne Tout respire l’intelligence architecturale » Hélène vit dans l’immeuble d’Henri Sauvage à Paris Dès la première visite, c’était une évidence : la lumière, les volumes, les matériaux, les terrasses en gradins… tout respirait l’intelligence architec- turale. Construit en 1912 par Henri Sauvage, c’est l’un des premiers immeubles hygiénistes à Paris. Les carreaux blancs, identiques à ceux du métro, permettaient de réfléchir la lumière et faciliter l’en- tretien de la façade. Grâce aux terrasses en gradin, chaque étage profite d’une vraie ouverture sur l'ex- térieur. Avoir un appartement aussi lumineux à Paris, c’est un luxe. Je suis peintre, et je travaille dans un atelier de la même époque, datant d’Eiffel. Là aussi, la lumière entre à flots par les immenses verrières. Vivre et créer dans ces lieux, c’est un bonheur quoti- dien, une source d’inspiration permanente. Quand l’agence m’a parlé de la maison du Bossu, j’imaginais une vieille bâtisse moyenâgeuse, avec des plafonds si bas qu’on en devenait bossu ! À la place, j’ai découvert l’œuvre d’un architecte stépha- nois des années 1930. Ici, pas d’escalier, on circule par une rampe hélicoïdale qui dessert des appar- tements disposés en éventail. Auguste Bossu avait imaginé cette rampe comme une rue intérieure, où l’on est obligé de croiser ses voisins. Depuis que je vis ici, j’ai fait énormément de recherches sur lui. Cet immeuble incarne une utopie architecturale du vivre ensemble. Sur le toit, il y a un lavoir collectif où cha- cun peut venir étendre son linge. Mon appartement est l’un des rares à avoir conservé son agencement d’origine, avec ses pièces pour chaque usage. Les moulures, le parquet en pin, les radiateurs en fonte, la cheminée en marbre de récupération sont tou- jours là, j’en prends soin. Mes meubles, tous chinés, trouvent naturellement leur place dans cet apparte- ment sans aucun angle droit ! RD RD