histoire & patrimoine. Pierre Emile Martin Représentation schématique d’un four Siemens-Martin pour permettre un meilleur contrôle de la composition que par le procédé Bessemer ; les impuretés (phosphore, soufre) sont mieux éliminées, tandis que la composition est plus facilement ajustée ce qui permet d’obtenir des aciers fins et alliés. Une série de brevets est déposée en 1865 par les inventeursMartin père et fils. Ce four Entre 1930 à 1960 plus de 70% de la produc- préparent une intervention pour le congrès à réverbère est rapidement adopté par les tion mondiale d’acier est réalisée à partir du de l’Iron and Steel Institute de l’automne 1878, aciéries de la Loire et gagne très vite toutes procédé Martin. qui se déroule à Paris. les régions de forges. A la fin de 1869, 25 fours La Loraine avec ses minerais pauvres et Mais leur exposé est jugé sans intérêt et sa Martin fonctionnaient en France. phosphoreux devra attendre 1878 le procédé lecture est repoussée à la session suivante. On aura une idée de l’importance prise par le Thomas et Gilchrist pour produire de l’acier L’accueil ironique de l’Iron and Steel Company procédé Martin en sachant qu’en 1908, on a de qualité à des prix compétitifs. à qui les deux cousins présentent leur décou- fabriqué dans le monde entier plus de 21 mil- verte, ne les décourage pas plus. lions de tonnes d’acier par ce procédé ; ce qui THOMAS ET GILCHRIST représente 48 % de la production mondiale DES ANGLAIS QUI VONT Leur invention a été la mise au point d’un ré- en acier. fractaire basique industriellement utilisable FAIRE LA FORTUNE c’est-à-dire présentant une tenue à haute En effet, au cours des années qui précèdent DE LA LORRAINE température et une durée de vie correcte. la Première Guerre mondiale, le procédé Mar- Dans sa version finale le réfractaire consiste tin prend définitivement le pas sur les autres Clerc de notaire anglais, Sidney Gilchrist Thomas en de la dolomie broyée puis cuite et mélan- moyens pour obtenir de l’acier, en dehors des (1850-1885),qui suit des cours du soir demé- gée avec du goudron. La cuisson de la dolo- territoires où les minerais phosphoreux sont tallurgie à Londres, va en effet bouleverser la mie est une calcination qui rend le minéral abondants, justifiant le recours au procédé métallurgie française. apte à supporter les hautes températures. Thomas. Pour cette raison, la France et l’Al- Il prend conscience que le procédé Bessemer Le goudron est à la fois un liant et un imper- lemagne restent les deux grandes puissances ne permet pas de traiter les fontes phos- méabilisant qui permet d’éviter à la matière sidérurgiques où le procédé Martin occupe la phoreuses et fait part de son idée de dé- de reprendre l’humidité et le dioxyde de car- place la moins importante par rapport à l’en- phosphorer les fontes à son cousin chimiste, bone qui les rendaient jusqu’alors impossible semble de la production d’acier. À l’opposé, au Percy Carlyle Gilchrist (1851-1935). Après deux à utiliser Royaume-Uni, 70% de la production d’acier ans de recherche et d’essais en laboratoire ils L’oxydation du phosphore nécessite, pour éviter est déjà réalisée à partir de fours Martin. déposent en novembre 1877 un brevet et l’usure prématurée du réfractaire, l’apport d’une charge de chaux d’environ 15% du poids Sydney Gilchrist Thomas Percy Carlyle Gilchrist de la fonte. Cet apport est ajouté à froid au détriment du métal et réduit la capacité de traitement du convertisseur mais la forma- tion d’un laitier riche en phosphore (phos- phate tétracalcique) et en chaux donne après solidification et broyage fin un sous-produit qui peut être utilisé comme engrais. Le congrès de l’Iron and Steel Institue de l’année 1879 consacre le succès du procédé qui est vite utilisé dans les aciéries de pays où les mi- nerais phosphoreux sont majoritaires comme la France ou l’Allemagne. En revanche les Etas Unis où les minerais sont faiblement phosphoreux mais encore trop pour être traités par le procédé Bessemer vont utiliser presqu’exclusivement le procédé Martin. N°10 • AVRIL 2019 • 51